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  • A propos des chapitres 15 et 21 du livre de Donald MELTZER

    Les structures sexuelles de la vie psychique (Ed. Payot, Paris, 1977)

    traduit de l’Anglais par J. Bégoin et F. Guignard, d’après Sexual States of Mind, 1972

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  • Quand, la nuit, des enfants « veillent aux graines »

    Vous souvenez-vous, enfant, qu’en chantant « Au clair de la lune » vous racontiez une histoire coquine dont vos parents, assurant une censure discrète, s’abstenaient souvent de vous apprendre le dernier couplet ?

           Bravant la censure, je vous le soumets, ce couplet à la gaieté licencieuse :

    « Au clair de la lune, on n’y voit qu’un peu, on chercha la plume, on chercha du feu, en cherchant de la sorte, je n’sais c’qu’on trouva mais je sais que la porte sur eux se ferma... ».

           Dans le couplet précédent, l’aimable lutin frappait chez la brune en la suppliant : « ouvre-moi ta porte, pour le Dieu d’amour !».

     

    A la porte...

     

           Ainsi, dans cette chanson, il y a une porte, une porte qui se ferme à la fin de la chanson et nous laisse donc tout loisir de fantasmer, d’imaginer, de rêver à ce qui se passe derrière la fameuse porte. La lune a une face cachée, tout comme nos pensées sur lesquelles le refoulement vient poser un voile pudique.

           C’est de cette porte, absente ou laissée ouverte dans de fréquentes situations cliniques, dont je voudrais vous entretenir. Nous sommes, en effet, de nombreux cliniciens à constater la récurrente exclamation de parents, lors de la première consultation pour l’un de leurs enfants : « il (ou elle) ne veut pas dormir dans sa chambre ; il (ou elle) dort dans notre (dans mon) lit ».

           La porte de la chambre des (ou du) parent(s) ne se referme donc pas. L’enfant nous est présenté comme s’étant imposé dans la chambre ou dans le lit des parents et les dits parents se montrent totalement démunis quand revient la nuit. Un état de fait s’est instauré. A entendre le ou les parent(s), l’enfant a décidé et a choisi son lit.

           A quelle place et à quel rôle sommes nous convoqués, nous les psy-consultants, quand un tel « aveu » nous est fait ? L’aveu, dis-je, suppose un certain ressenti de culpabilité ou de honte. Certains parents et certains enfants le formulent et la demande de consultation est, entre autres, motivée par ce            « problème » : « je sais que ce n’est pas bien mais il (ou elle) pleure, refuse de s’endormir et je finis (ou nous finissons) par céder ». D’autres parents n’en sont pas du tout là et semblent entériner avec complaisance la situation, comme un état de fait.

           Le psychologue ou le pédopsychiatre, en garant du rappel de la différence des sexes et des générations, seraient amenés à questionner cet état de fait       (« Pensez-vous que ce soit bien pour votre enfant ? Jusqu’à quel âge de votre enfant tolèrerez-vous qu’il dorme ainsi avec vous ? ») et à approuver ceux qui, après avoir mis au travail ce comportement, réintègreraient bientôt leurs chambres respectives...

           Dans cet espace-temps de la consultation, c’est à croire, parfois, que seul le psychologue a construit un fantasme de scène primitive, a intégré « l’interdit du toucher » (selon l’expression de Didier Anzieu), que seul le psychologue perçoit l’intense érotisation de ces corps à corps.

           Cette impression d’absence du fantasme originaire (de scène primitive, en l’occurrence) dans la psyché parentale est bien évidemment un leurre, œuvre d’un refoulement et/ou d’une dénégation particulièrement actifs. En tout état de cause, les parents et l’enfant dormiraient, eux, en toute innocence ! Et si le psychologue interroge cet état de fait, ne pourrait-il pas être suspecté de pensées malsaines, de voyeurisme ? D’ailleurs, n’est-ce pas le consultant qui est convié à une scène primitive, en témoin qui assiste, qui entend une famille lui conter un récit qui concerne son espace privé et son espace intime, qui concerne une chambre des parents ?

           Pour l’enfant qui dort dans le lit ou dans la chambre des parents, la réalité externe, telle qu’elle nous est présentée, évacue dans le discours conscient la réalité interne, celle des fantasmes originaires, là encore, celle entre autres du désir d’assister au coït des parents, celle du désir œdipien d’évincer le parent rival (dans nombre de situations cliniques, l’un des parents, constatant que sa place est occupée par l’enfant dans le lit conjugal, finit par aller se coucher dans le lit et dans la chambre de son enfant), celle de contrôler toute velléité de la part des parents de concevoir un autre enfant, bref, la réalité externe tenterait d’évacuer, chez l’enfant, toute pensée sur la sexualité des parents.

           Leurre, à nouveau, puisque ces pensées sur la sexualité des parents alimentent la scandaleuse sexualité infantile, décrite par S. Freud et en, particulier, l’activité psychique des fantasmes masturbatoires inconscients.

           Finalement, c’est d’un enfant fantasmé sans fantasmes dont on voudrait nous parler et surtout nous convaincre...

           En laissant faire l’enfant, n’est-ce pas à son tour la névrose infantile du ou des parents qui trouverait, là, l’occasion de se mettre en scène ? L’attitude parentale témoigne parfois d’une identification à leur enfant teintée de fascination, à cet enfant qui a osé, lui, s’imposer dans la chambre des parents.

           L’incestuel chez le ou les parents est-il exporté dans l’enfant, qui savourerait intuitivement la permissivité du ou des parents comme une autorisation à le laisser voir et entendre ce qui se passe dans ce lit ? S’échangerait-on voyeurisme et exhibitionnisme, sous couvert d’une bienvenue innocence prêtée à l’enfant ?

           Une autre scène primitive est-elle convoquée, celle du parent réalisant par procuration son désir d’assister à la scène primitive concernant ses propres parents ?

           Mais qu’allez-vous donc chercher minuit à quatorze heure, Monsieur le Psychologue, ... « dès qu’il est dans notre lit, il s’endort !... ».

           En tout cas, l’attitude de certains « nouveaux parents » ne manque pas de nous interpeller quand, par exemple, l’épanouissement personnel de chacun des parents semble devoir passer par l’enfant, par un enfant-roi que rien ni personne ne peut et ne doit contrarier. Comme si une idéalisation de l’enfant devenait nécessaire à l’affirmation identitaire du parent.

           Enfin, on peut interroger cette réification de la parole alimentée par un certain discours psy qui fait dire à certains parents qu’il ne faut rien cacher aux enfants, « qu’il faut tout leur dire », ce qui nous amène à entendre en consultation que les enfants ont été les premiers prévenus, par exemple, « que maman ne prend plus la pilule », façon comme une autre d’être prévenu qu’un petit frère ou qu’une petite sœur pourraient bientôt s’annoncer !

           Quelques vignettes cliniques méritent que nous nous attardions et, succinctement présentées, que nous repérions quelques organisateurs psychiques, implicites ou explicites dans ces situations.

     

    Cinq histoires

     

           Céline, âgée de six ans, est accompagnée de ses parents qui avaient parlé au téléphone des problèmes de sommeil et d’angoisse de leur fille. Céline, dit sa mère à leur arrivée, est très inquiète de cette première consultation et j’entends que Madame l’est tout autant. Très vite, Madame prend la parole : « Céline ne veut pas dormir seule ». Depuis deux ans, la famille est installée dans une villa où Céline a sa chambre mais elle refuse d’y dormir. Céline dort soit dans le lit de ses parents, soit sur un petit matelas qu’ils mettent à côté de leur lit de couple. Si Céline s’endort dans sa chambre, elle se réveille, hurle et rejoint ses parents. Céline aurait des peurs-paniques. Bien que honteuse de la situation, Céline ne pourrait s’empêcher d’être ainsi paniquée la nuit mais aussi le jour, en présence de sa mère. Elle ne peut rester seule à l’étage, par exemple, quand elles sont toutes les deux à la maison. Céline est toute différente et beaucoup plus détendue quand elle est seule avec son père.

           Au cours des entretiens suivants apparaîtra l’intense participation psychique de la mère aux peurs-paniques nocturnes mais aussi diurnes de sa fille. Adolescente, la mère de Céline ne s’endormait pas tant que son père n’avait pas fait le tour de la maison pour s’assurer qu’aucun voleur ne rôdait. La mère dit avoir consulté un psychiatre à l’époque de son mariage.

           Le réel est présenté comme imposant une pesanteur, un immuable dans l’attitude de l’enfant qui ne peut dormir qu’avec ses parents, que proche de sa mère. L’imaginaire est saturé d’une problématique psychique elle aussi tenace : Céline est l’objet contra-phobique de sa mère. Une tentative de psychothérapie de Céline, associée à des entretiens très réguliers avec les parents n’apporteront qu’une amélioration partielle à cette situation clinique assez fermée, tout compte fait, à un véritable travail thérapeutique. L’arrivée d’un nouvel enfant, bien-sûr à la demande de Céline (!), colmatera les brèches de cette organisation groupale familiale fragile, tout comme les problématiques individuelles, de Céline comme de sa mère, fragiles elles aussi, nous laisseront un sentiment d’inachevé et nous feront craindre un avenir psychique tourmenté pour elles deux, sans parler du père qui semblait supporter cette situation sans vraiment comprendre.

           Un rendez-vous est demandé en urgence pour un garçon de six ans, Rachid. La psychologue scolaire a vivement insisté pour qu’il soit vu rapidement. La mère de Rachid dit au téléphone que son fils aîné ne veut rien faire à l’école, au cours préparatoire et qu’il est très agressif vis-à-vis des autres enfants et très turbulent à la maison. Au premier rendez-vous, la mère se présente avec Rachid, bel enfant au visage séducteur et au regard très accrocheur. Après avoir affirmé que son fils est très agité depuis toujours, Madame F. explique que l’école lui avait déjà conseillé de consulter quand Rachid était en maternelle. Elle avait hésité mais aujourd’hui elle constate que les difficultés empirent, Rachid agressant les autres, distrayant la classe. Très vite, Mme F. ajoute : « il faut que je vous dise c’est la psychologue scolaire qui m’a conseillé de vous en parler que Rachid a beaucoup dormi avec moi quand il était petit ; son père était souvent, toujours en déplacements pour son travail et cela pendant des années, alors... ». Mme F. m’explique que Rachid a surtout été élevé par ses parents à elle car elle travaillait comme caissière dans la journée et parfois en soirée. Son père à elle lui proposait souvent de laisser Rachid, son petit-fils, donc, chez lui car cela éviterait ainsi à l’enfant de trop fréquents déplacements. Mme F. poursuit : « Rachid, il n’a pas ouvert les yeux sur son père. Le samedi, alors que son père ne travaillait pas, on le laissait chez mes parents. Rachid était avec nous le dimanche. Mme F. redit alors qu’en semaine elle récupérait son fils chez ses parents, après son travail et qu’elle « le prenait dans son lit, jusqu’à la naissance de sa sœur ».

           Le fil de ses associations amènera Mme F. à évoquer sa nature angoissée et l’impact de la disparition de son père à elle (Rachid avait alors trois ans et demie), le fameux grand-père qui lui disait de lui laisser son fils le soir plutôt que de passer le chercher après son travail. Mme F. se décrit comme très affectée par cette disparition brutale : « j’étais très proche de mon père ; au moment de sa mort, mon mari était absent ; j’ai fait une dépression, je me renfermais : cela a affecté Rachid, j’en suis sûre ». Mme F. se présente comme la fille préférée de son père. Elle évoque ses sœurs qui lui disaient de se reprendre et qui lui rappelaient qu’elle n’était pas la seule à avoir perdu son père...Un lien pourra être fait entre la dépression de la mère et l’agitation de Rachid. Rachid présente tous les symptômes de l’enfant dit hyperactif.

           Le réel de cette situation clinique affiche une saturation d’agitation, d’excitation, mère et fils étant dans un duo-duel infernal, Mme F. évoquant à la fois un fils insupportable qui « la fait devenir malade » et un fils auquel « elle tient comme à la prunelle de ses yeux ». La réalité interne, fantasmatique est saturée, quant à elle, par l’incestuel : Rachid est l’enfant oedipien que la mère aurait eu avec son père tant aimé. Cette configuration se retrouve bien évidemment dans nombre de cas cliniques, la figure paternelle atone étant supplantée par celle d’un grand-père idéalisé.

           Jessica, âgée de dix ans et demie et sa mère consultent sur les conseils de l’institutrice. Jessica a un look d’adolescente, précoce donc, avec une mèche de cheveux sophistiquement positionnée sur un côté du visage. Jessica aurait du mal à se concentrer à l’école, dit sa mère qui ajoute tout de suite : « il faut dire qu’elle aime « coucher » avec moi ; si je l’oblige à dormir dans sa chambre, elle pleure ». Les parents de Jessica se sont séparés il y a un an et demie. Jessica voit très souvent son père, qui passe la voir et l’aide à faire ses devoirs. Le couple a vécu ensemble plusieurs années, Jessica « couchant » déjà dans le lit ou juste à côté du lit conjugal. Jessica porte le nom de sa mère qui a reconnu sa fille avant sa naissance. Mme E. me tiendra alors des propos glaçants mais qui ont le mérite d’une certaine franchise : « je savais que je ne voulais pas me marier ; je l’ai décidée toute seule, cette fille ; j’ai décidé toute seule d’avoir un enfant ; on s’entendait déjà pas très bien avec son père ; je voulais un bébé, toute seule ; j’ai toujours vécu seule, avant ; vous savez, je l’ai eue à trente huit ans ». Plus tard, elle ajoutera : « cette histoire, qu’elle vient tout le temps dormir avec moi, ça m’ennuie plus pour elle que pour moi car ce serait normal qu’elle dorme dans sa chambre mais il faut le reconnaître...j’aime bien aussi ». 

           Elle a fait un bébé toute seule, la mère de Jessica. Elle paraphrase le texte de la chanson de Jean-Jacques Goldmann ! Il n’y a pas que les habits portés par les adolescent(e)s qui sont « uni-sexe ». Un père très effacé, bien que s’investissant auprès de sa fille (ce qui n’est pas toujours le cas dans des situations cliniques de ce type), un père qui ne peut ou ne veut pas tenir sa place et son rang dans cet univers de femmes, dominatrices mais aussi très fragiles, un père falot face aux revendications phalliques des femmes de son entourage, voilà un autre profil. Le lit de la mère est le lieu d’un étayage homosexué entre mère et fille, chacune cherchant à constituer et/ou à soigner son homosexualité primaire. Quand la mère de Jessica évoquera l’utilité, pour elle, d’engager une démarche psychothérapeutique, je ne pourrai que l’encourager.

           Mickaël, 7 ans, s’endort, lui, chaque soir au côté de son père. Sa mère se fait une place, plus tard dans la soirée, dans le lit conjugal ou bien tente de transporter son fils endormi dans sa chambre. Mickaël est le soutien narcissique de son père, père déprimé depuis la disparition brutale de son jeune frère, frère du père qui était le parrain de Mickaël.

           Les enfants nous parlent souvent de leurs jeux vidéo, de leurs consoles de jeux. L’enfant est parfois celui qui console le je d’un parent narcissiquement affaibli.

           Enfin, je prendrai comme dernier exemple une situation clinique qui mobilisa beaucoup l’inquiétude de l’institution (un Institut de Rééducation) dans laquelle Alexandra, sept ans, venait d’être placée. Un éducateur, bouleversé, raconte en groupe d’analyse de la pratique ce qu’il a vécu récemment dans le groupe de vie où il assurait le coucher des enfants. Passant à proximité de la chambre qu’Alexandra partage avec une autre enfant, Sabrina, l’éducateur est interpellé par Sabrina qui lui dit, comme ça, à haute et très intelligible voix : « Alexandra m’a dit qu’elle avait été violée par son père ». L’éducateur, stupéfait, retrouve assez rapidement ses esprits et répond alors aux deux filles : « j’ai bien entendu ce que tu viens de dire, Sabrina. Je remarque que ce n’est pas Alexandra elle-même qui m’a parlé ». S’adressant directement à Alexandra, il poursuit : « tu viens d’arriver dans le groupe ; nous nous connaissons encore très peu ; tu pourras peut-être me reparler de tout cela, à moi ou à mes collègues éducatrices, dans les jours qui viennent. En tout cas, je n’oublierai pas ce que tu as dit à Sabrina et nous reprendrons tout cela avec toi très bientôt ». Alexandra a écouté l’éducateur, calmement. Elle va vers son placard et dit : « bon, c’est l’heure de se coucher et Maman m’a dit de toujours réciter une prière ». Elle sort une pochette de son placard et commence à lire à haute voix le Notre Père. L’éducateur entend alors cette phrase : « pardonne nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont...enfoncés ».

           Le climat familial particulièrement sournois, les suspicions diverses sur la perversité sexuelle des parents, sur le fait que les enfants de cette famille pouvaient être mêlés, sans aucune retenue ni aucune censure, à la sexualité de leurs parents ou éventuellement être abusés eux-mêmes, comme semblait le laisser entendre Alexandra qui disait aussi dormir dans le lit des parents, amenèrent l’équipe de l’Institut de Rééducation à rester très vigilante et si possible protectrice vis à vis de cette enfant, placée la semaine mais rentrant chez ses parents les week-ends.

           Le viol n’a pas été confirmé, avéré, mais l’atmosphère excitante, malsaine, perverse, encore une fois, de cette situation clinique qui en rappelle malheureusement d’autres, produit ces télescopages extrêmement inquiétants chez l’enfant entre une réalité vécue, entre du vu et de l’entendu et une activité fantasmatique débridée, débordant leur pare-excitation, si celui-ci a pu se constituer.

           Retour à la « chambre des dépités » ?

     

           Le retour dans son lit et dans sa chambre, pour l’enfant, loin de faire souffrir démesurément celui-ci le rassure souvent, fait baisser l’angoisse et la fréquence des cauchemars, alors que ce sont ces mêmes arguments qui justifiaient l’occupation de la chambre des parents par leur rejeton. Si l’enfant en est quelque peu dépité, il trouve finalement de l’apaisement à daigner récupérer ses pénates. A l’assemblée familiale, la chambre des dépités, finalement, est une enceinte propice à la mise en place d’une névrose infantile de bon aloi. Mais que de palabres pendant quelques consultations chez le psy, ou, si nécessaire, pendant la durée d’une psychothérapie !

     

     

     

     

     

    Veiller au grain

     

           Le grain, dans cette expression « veiller au grain », n’évoque pas la graine du vocabulaire agricole ni la « petite graine », expression bien connue que les parents ont trouvée pour expliquer la procréation à leurs enfants mais le vent, dans le vocabulaire marin. Un grain de vent, c’est l’annonce d’une possible tempête, d’un tourbillon qui se forme mais qui durera peu, qui désemparera la manœuvre du bateau. Bon, les cigognes ont peut-être subi un grain pour amener les enfants et si les enfants naissent dans les choux, il a bien fallu que le vent pousse quelques graines et quelques abeilles butineuses ! Mais voilà que je repars sur les théories sexuelles infantiles. Quel vent dans les pensées, dans les fantasmes, dans les rêves ! Quel plaisir de toujours avoir ce grain-là dans la tête ! Il est le moteur de toutes les pulsions épistémophiliques, de l’envie de savoir !

     

    Marc LHOPITAL

     

     

    Note

     

           Le Dr Philippe Jeammet, dans un livre d’entretiens avec l’historien Marc Ferro, intitulé Que transmettre à nos enfants ? , écrit : « Je reste toujours étonné de voir combien souvent des parents, sous des prétextes divers, prennent leur enfant dans leur lit, le font coucher dans leur chambre ou vont dormir dans la sienne avec lui – et ceci jusqu’à un âge souvent avancé -, au-delà même des premiers signes de puberté. Les conséquences n’en sont pas toujours tragiques, mais il n’y a jamais avantage à le faire, et bien souvent les conséquences négatives s’en feront sentir à l’adolescence. L’enfant éprouvera alors le besoin de rétablir une distance, tout en se dissimulant le plaisir ambigu de cette situation selon les deux moyens privilégiés déjà cités : les conduites d’opposition et les plaintes corporelles » (p. 178).